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Ukraine: de nouveaux pourparlers suscitent l'espoir, malgré l'extension du conflit
Un nouveau round de pourparlers russo-ukrainiens a été prolongé jusqu'à mardi, faible lueur d'espoir alors que l'offensive russe contre l'Ukraine s'élargissait lundi à l'ensemble du pays, jetant sur les routes de l'exil près de trois millions de personnes.
Au 19e jour de l'invasion de l'Ukraine lancée par Vladimir Poutine, le Kremlin a même évoqué "la possibilité de prendre sous contrôle total (les) grandes villes qui sont déjà encerclées". Ce qui impliquerait un assaut militaire majeur, vu la farouche résistance ukrainienne.
Ces derniers jours, les combats se sont intensifiés autour de Kiev, presque entièrement encerclée, qui s'est vidée de plus de la moitié de ses trois millions d'habitants.
A la périphérie nord-ouest de Kiev, théâtre de violents combats depuis plusieurs jours, un premier journaliste étranger, l'Américain Brent Renaud, est mort dimanche, atteint à la nuque par une balle d'origine incertaine.
La capitale est "une ville en état de siège", a estimé dimanche un conseiller du président ukrainien.
A Donetsk, les séparatistes prorusses soutenus par Moscou, qui tiennent ce centre industriel de l'est de l'Ukraine depuis 2014, ont affirmé qu'une frappe de l'armée ukrainienne avait visé le centre-ville, faisant au moins 16 morts selon le "ministère" local de la Santé et 23 morts selon le puissant Comité d'enquête russe.
Les séparatistes ont publié des photos montrant des corps ensanglantés gisant dans une rue, au milieu de débris.
L'armée ukrainienne a fermement démenti avoir tiré un missile sur Donetsk. "Il s'agit définitivement d'un missile russe ou d'un autre type de munition", a déclaré le porte-parole de l'armée ukrainienne Leonid Matioukine lors d'un point-presse.
Dans la région voisine de Lougansk, où les séparatistes prorusses ont également fondé une "république populaire" depuis 2014, toute la partie qui restait sous contrôle ukrainien jusqu'à l'invasion le 24 février, est désormais "sous les bombardements", a indiqué son chef militaire ukrainien, Serguïi Gaïdai.
Il a accusé les Russes de frapper "habitations, hôpitaux, écoles, réseaux d'eau, de gaz et d'électricité", ainsi que les trains évacuant vers l'ouest les civils, au rythme de quelque 2.000 personnes par jour.
- "Plus aucun endroit sûr" -
Plus à l'ouest, dans une autre grande ville industrielle, Dnipro, où se réfugiaient jusqu'ici les civils arrivant de Kharkiv ou Zaporojie, les sirènes d'alerte ont retenti lundi pendant cinq heures d'affilée, pour la première fois depuis le début de l'invasion russe le 24 février.
Si la ville n'a finalement pas été touchée, "il n'y a plus aucun endroit sûr", a témoigné à l'AFP Yilena, 38 ans, arrivée de Zaporojie début mars.
La Russie resserre aussi son étau dans le sud du pays. Ses forces navales ont "établi un blocus à distance de la côte ukrainienne de la mer Noire", selon le ministère britannique de la Défense.
La situation reste dramatique dans le port stratégique de Marioupol (sud-est), assiégé par les Russes. Pour la première fois depuis des jours, un convoi de quelque 160 voitures a cependant pu quitter la ville lundi en direction de Zaporojie, selon la municipalité.
Des milliers d'habitants y vivent terrés dans des caves, privés d'eau, d'électricité, de chauffage. Plus de 2.187 habitants ont péri à Marioupol depuis le 24 février, selon la municipalité.
La guerre gagne aussi l'ouest du pays, jusqu'ici plutôt calme. Des bombardements avaient déjà fait 35 morts dimanche sur la base militaire de Yavoriv, proche de la Pologne, pays membre de l'Otan et de l'Union européenne, et proche de Lviv, ville refuge de milliers de déplacés.
Lundi, neuf personnes sont mortes dans une frappe contre une tour de télévision près de Rivne, non loin de Loutsk où un aérodrome militaire avait déjà été touché samedi, selon un premier bilan des autorités locales.
Les dirigeants ukrainiens ne cessent d'appeler l'Otan à instaurer une zone d'exclusion aérienne au-dessus du pays, mais l'Alliance refuse, de crainte d'être entraînée dans la guerre.
Au total, plus de 2,8 millions de personnes ont fui l'Ukraine depuis le début de l'invasion russe, selon le dernier décompte publié lundi par l'ONU, qui recense aussi environ 2 million de déplacés à l'intérieur du pays.
- Rencontre Poutine-Zelensky? -
C'est dans ce contexte qu'ont repris lundi, par visioconférence, des pourparlers entre délégations russe et ukrainienne.
En début d'après-midi, le président Zelensky, qui n'y participe pas directement, qualifiait les négociations de "difficiles".
"Nous devons tenir bon et nous battre pour gagner, pour parvenir à une paix que les Ukrainiens méritent, une paix honnête avec des garanties de sécurité pour notre Etat, pour notre peuple. Et pour les mettre par écrit lors de négociations, de difficiles négociations", a-t-il déclaré dans une vidéo.
Vers 16H00 locales, le chef des négociateurs ukrainiens Mykhaïlo Podoliak annonçait une "pause technique" et une reprise des pourparlers mardi.
Après trois tours de discussions en présentiel au Bélarus, puis une rencontre jeudi en Turquie des chefs de la diplomatie russe et ukrainien, les deux parties s'étaient montrées dernièrement plus optimistes.
Un négociateur russe avait évoqué dimanche soir des "progrès significatifs" et "des documents à signer" en préparation.
Vendredi, Vladimir Poutine avait évoqué des "avancées", puis Zelensky samedi une approche nouvelle, "fondamentalement différente", de Moscou dans les négociations.
Pour le chef de l'Etat ukrainien, sa délégation a "une tâche claire: tout faire pour assurer une rencontre des présidents."
Signe que les marchés veulent croire à une percée: les prix du pétrole ont reculé sur les marchés lundi, le baril de brut WTI repassant brièvement sous la barre des 100 dollars, après avoir dépassé les 130 dollars la semaine dernière.
Retenu par les pourparlers, M. Zelensky, qui multiplie les interventions en visioconférence devant des forums occidentaux, a chargé son Premier ministre Denys Chmygal d'intervenir devant les membres de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe.
M. Chmygal les a appelés à décider "l'expulsion immédiate" de la Russie de cette organisation paneuropéenne de défense des droits humains, ce qui serait une première dans son histoire.
En attendant l'issue des négociations, le risque d'un élargissement du conflit est dans tous les esprits.
Le conseiller à la sécurité nationale du président américain joe Biden, Jake Sullivan, rencontrait lundi dans la plus grande discrétion Yang Jiechi, le plus haut responsable du Parti communiste chinois pour la diplomatie.
La Maison Blanche s'inquiète d'une possible assistance de Pékin à Moscou.
Bien que prévus de longue date, des exercices de l'Otan, "Cold Response 2022", ont aussi démarré lundi en Norvège, qui testeront avec une urgence nouvelle la capacité de ses membres à porter secours à l'un d'eux.
Quelque 30.000 soldats, 200 avions et une cinquantaine de navires de 27 nations seront mobilisés dans l'Arctique.
- Nouvelles sanctions
Pour l'instant, les Occidentaux utilisent avant tout l'arme économique contre la Russie.
L'Union européenne devait annoncer lundi après-midi un quatrième train de sanctions, pour les étendre à de nouveaux oligarques russes, dont le milliardaire Roman Abramovitch, propriétaire du club anglais de football de Chelsea, ont indiqué des diplomates à l'AFP.
Auparavant, 862 personnes et 53 entités russes figuraient déjà sur cette liste noire qui interdit l'entrée sur le territoire de l'UE et permet la saisie de leurs avoirs.
Alors que les sanctions précédentes ont déjà gelé quelque 300 milliards de dollars de réserves que détient la Russie à l'étranger, Moscou a accusé l'Occident de vouloir provoquer un défaut de paiement "artificiel" de la Russie.
"Les déclarations selon lesquelles la Russie ne peut remplir ses obligations concernant sa dette publique ne correspondent pas à la réalité", a estimé lundi le ministère russe des Finances.
La Russie pourrait avoir du mal à honorer plusieurs échéances de paiement de dettes en devises étrangères courant mars-avril. Ravivant le souvenir de son humiliant défaut de 1998.
Le bras-de-fer économique russo-occidental a des effets très concrets sur la population russe: dernier en date, le réseau social Instagram, propriété du groupe américain Meta, est devenu inaccessible en Russie lundi.
Moscou, qui accuse Meta de propager des appels à la violence contre les Russes en lien avec le conflit en Ukraine, a ajouté le réseau à sa liste de sites en "accès restreint", comme Facebook, Twitter et plusieurs médias critiques du Kremlin.
burx-cat/fjb
H.Cho--CPN