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La Pologne, de plus en plus ambitieuse sur la scène européenne, prend le 1er janvier le relais de la Hongrie à la présidence tournante du Conseil de l'Union européenne, un changement accueilli avec soulagement à Bruxelles.
Durant six mois, Varsovie devrait jouer beaucoup plus collectif que Budapest pour tenter de faire avancer les dossiers européens.
A commencer par le soutien à l'Ukraine, dont la Pologne est l'un des fervents défenseurs, tandis que Viktor Orban avait offusqué Bruxelles en se rendant à Moscou en juillet pour rencontrer Vladimir Poutine et en multipliant les initiatives sans concertation.
La présidence hongroise s'est révélée "assez exaspérante" pour les autres pays européens, résume Guntram Wolff, du centre de recherche Bruegel, basé à Bruxelles.
"Tout le monde est impatient de prendre un nouveau départ", glisse, en écho, un diplomate sous couvert d'anonymat.
La présidence polonaise démarre dans le contexte incertain de l'arrivée au pouvoir de Donald Trump le 20 janvier aux Etats-Unis. Les Européens redoutent un désengagement américain en Ukraine et des tensions commerciales avec les Etats-Unis.
"Nous sommes dans une période de défis extrêmes, il y a une guerre juste à côté de nous" en Ukraine, souligne l'ambassadrice Agnieszka Bartol, représentante permanente polonaise auprès de l'Union européenne.
Durant six mois, la Pologne érige en priorité la sécurité européenne, qu'elle soit militaire, économique ou énergétique.
Le gouvernement polonais entend aussi s'investir dans la lutte contre l'immigration irrégulière. Il attend avant le sommet européen du mois de mars la proposition de la Commission pour faciliter les expulsions.
"Ce sera très rapidement à l'ordre du jour", insiste Agnieszka Bartol, qui estime insuffisant le pacte asile et migration, adopté en mai 2024 mais contre lequel la Pologne avait voté.
Sur ce volet migratoire, le gouvernement de Donald Tusk a obtenu le 11 décembre un feu vert de la Commission, autorisant certaines limitations exceptionnelles du droit d'asile en cas "d'instrumentalisation" des migrants par la Russie.
La Pologne accuse la Russie et le Bélarus d'utiliser les afflux de migrants à sa frontière pour déstabiliser la région.
- "Cohabitation très dure" -
Entre autres dossiers de cette présidence tournante, les autorités polonaises devraient accompagner le "pacte pour une industrie propre" que la Commission européenne doit présenter fin février.
La Pologne s'est en effet positionnée sur la fabrication de batteries au lithium pour les véhicules électriques, dont elle est devenue un leader européen.
"La Pologne est bien placée pour mettre à profit sa présidence afin d'obtenir un accord sur un solide programme d'investissements de l'UE dans les technologies propres", avance Neil Makaroff, membre du think tank Strategic Perspectives.
Le pays de près de 37 millions d'habitants demeure pourtant très dépendant du charbon, à l'origine de 63% de sa production d'électricité en 2023. Mais il tente de prendre le virage des renouvelables, associé au projet de mettre en service une première centrale nucléaire à l'horizon 2030.
Côté climat, les Européens doivent négocier durant l'année l'objectif proposé par la Commission de réduire de 90% les émissions de gaz à effet de serre en 2040, par rapport à 1990.
Mais les discussions ont à peine démarré. Des ONG craignent que la présidence polonaise ne se montre guère allante sur le sujet et qu'il faille attendre le passage de témoin au Danemark au 1er juillet.
Exercée à tour de rôle par chaque Etat membre pendant six mois, la présidence tournante du Conseil de l'UE a une dimension symbolique mais permet de donner des impulsions au sein des 27.
Les ambitions de la Pologne pourraient cependant être limitées par ses échéances électorales nationales.
Une présidentielle y est prévue en 2025 et pourrait inciter Donald Tusk à la prudence sur la scène européenne.
"Cela va les handicaper car ils sont dans une cohabitation très dure", rappelle un diplomate européen. "Sur les grands choix, ils se positionneront tout le temps à l'aune de la présidentielle".
La Pologne vit une cohabitation délicate entre le gouvernement pro-européen de Tusk et le président conservateur Andrzej Duda, proche du parti nationaliste polonais Droit et Justice (PiS) et qui oppose son véto à la plupart des initiatives législatives gouvernementales.
P.Schmidt--CPN