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La Ciivise sonne l'alarme sur les séquelles traumatiques de l'inceste
La Ciivise sonne l'alarme sur les séquelles traumatiques de l'inceste / Photo: JULIEN DE ROSA - AFP/Archives

La Ciivise sonne l'alarme sur les séquelles traumatiques de l'inceste

"J'ai pris perpétuité à huit ans". Absence de libido, refus de maternité, addictions, anorexie... les victimes de violences sexuelles dans l'enfance en subissent les conséquences traumatiques à l'âge adulte, alerte la Commission Inceste dans un rapport publié mercredi.

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La Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) dresse un bilan de ces séquelles parfois invisibles à partir des 16.414 témoignages reçus depuis le lancement de son appel à témoignages il y a un an jour pour jour.

Le traumatisme subi enfant affecte encore aujourd'hui leur santé, physique et mentale, autant que leur vie familiale, sexuelle et professionnelle.

"Ce qui saute aux yeux en lisant les mails reçus, c'est l'expression de la souffrance, une souffrance extrême et qui dure. Ce n'est pas penser à quelque chose de douloureux qui s'est passé il y a longtemps, c’est l'éprouver aujourd'hui", explique à l'AFP le juge Edouard Durand, coprésident de la Ciivise.

Ceux qui témoignent évoquent "presque toujours" des conséquences "sur leur vie intime à l'âge adulte, leur couple, leur vie de parent, leur sexualité", note le rapport.

Quatre femmes sur dix rapportent des douleurs, principalement du vaginisme. Près d'un homme sur trois des troubles de l'érection.

Trois victimes sur dix évoquent une absence ou baisse de libido ou une absence de vie sexuelle. A l'inverse, les violences sexuelles se traduisent par une hypersexualisation (multiplication des partenaires notamment) pour la moitié des hommes.

"Ma sexualité a été une longue traversée du désert. J'ai été atteinte de vaginisme pendant une vingtaine d'année", dit une femme citée dans le rapport.

- "Réalistes et réalisables" -

Beaucoup de témoignages évoquent aussi un refus de la maternité et la peur de reproduire les agressions sur leur propre enfant.

Ces violences subies enfant ont aussi un impact sur la santé de l'adulte: la grande majorité ont "développé des comportements à risque".

Troubles alimentaires, addictions, agressivité, tentatives de suicide sont les plus souvent rapportés. Une femme sur deux décrit ainsi un trouble alimentaire (anorexie, boulimie...). Quatre hommes sur dix un problème d'addiction (alcoolisme, drogue).

"En maigrissant, j'avais le sentiment de reprendre le contrôle de mon corps et d'échapper à mon agresseur", a confié une victime à la Ciivise. "Je prends de l'alcool ou du cannabis pour m'anesthésier, et non pas pour chercher un effet récréatif, euphorique. C'est simplement pour pouvoir sombrer dans un sommeil sans rêve, puisque les rêves sont essentiellement formés de cauchemars", dit un autre.

La Ciivise liste cinq préconisations "réalistes et réalisables" qu'elle appelle les pouvoirs publics à mettre en oeuvre "d'urgence", alors que sont présentés la semaine prochaine le Projet de loi de financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) et le projet de loi de finance (PLF).

Elle demande ainsi de garantir et de rembourser aux victimes des soins spécialisés en psychotrauma, actuellement peu accessibles et onéreux. "Je crois que j'ai dépensé une voiture ou deux pour ma reconstruction psy", dit un témoignage.

Elle demande d'organiser un "repérage systématique" par les professionnels en contact avec les enfants (médecins, infirmières scolaires...). Et de créer une "cellule de soutien et de conseil" pour les aider à gérer les révélations, qui peuvent être source de stress pour eux.

Elle revendique plus de moyens pour les services de police judiciaire spécialisés dans la cyber-pédocriminalité, alors que le "grooming" (approcher un enfant par internet pour l'agresser sexuellement) a bondi. Enfin, elle recommande une "grande campagne nationale d'information" sur les violences sexuelles faites aux enfants, la dernière datant de 2002.

Comme en écho aux témoignages de la Ciivise, l'actrice Corinne Masiero a évoqué lundi sur France Inter les conséquences de l'inceste qu'elle a subi: "Il y a deux mots que je déteste, c'est amour et famille. Volontairement, j’ai pas voulu avoir de gosse car, à un moment, la chaîne il faut la casser".

Elle témoignera, avec d'autres, dans le documentaire "Inceste, le dire et l’entendre", diffusé le 26 sur France 3. Envoyé Spécial traitera aussi de l'inceste dans son édition jeudi.

P.Petrenko--CPN