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Le cancer de la peau, une réalité bien bretonne
Le cancer de la peau, une réalité bien bretonne / Photo: FRED TANNEAU - AFP/Archives

Le cancer de la peau, une réalité bien bretonne

Aussi surprenant que cela puisse paraître, la Bretagne connaît un taux de cancer de la peau trois fois supérieur à la moyenne nationale. Une situation qui inquiète les autorités sanitaires qui ont lancé une campagne pour sensibiliser à ce risque.

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"On est confronté à une augmentation progressive mais continue du nombre de mélanomes en Bretagne sur les 30 dernières années: on est trois fois supérieur à la moyenne française", s'inquiète Élodie Poullin, directrice de la CPAM des Côtes-d'Armor, en charge de la coordination de la prévention en région Bretagne.

Ainsi, en juin, une campagne de sensibilisation "Alerte Breizh" a été lancée sur les réseaux sociaux, sur un ton humoristique et s'amusant des clichés bretons: "Mets plus de crème solaire sur ta tête que de beurre sur ta crêpe" ou "mets ton chapeau rond pour protéger ton crâne d'oeuf".

Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette singularité de la péninsule armoricaine, avec près d'un millier de mélanomes diagnostiqués chaque année et, chez la femme, "une surmortalité importante de 28% par rapport à la France métropolitaine", selon l'Assurance maladie.

En premier lieu, les habitants ont tendance à ne pas se protéger face à une météo parfois fraîche et nuageuse. "Or, malgré tout ce qu’on dit (sur le climat breton, ndlr), la Bretagne a quand même une incidence UV importante", note le dermatologue Luc Sulimovic, président du Syndicat national des dermato-vénéréologues (SNDV).

"Les coups de soleil peuvent aussi se produire quand la température est plus faible, au niveau de l'intensité à partir du niveau UV 3, il faut se protéger et pas qu'à la plage", renchérit Mme Poullin.

Autre explication à cette singularité bretonne: le peuplement. "Parmi la population, on a beaucoup de phototype 1. Quand on a une peau, les yeux, une carnation, une couleur de cheveux clairs, on est plus à risque génétiquement de développer un cancer", souligne Mme Poullin.

Enfin, dans une région où les côtes se comptent en milliers de kilomètres, les habitants ont tendance à être beaucoup en extérieur, sans compter une importante population d'agriculteurs et de pêcheurs "qui s'exposent continûment" sans avoir toujours le réflexe d'utiliser de la crème solaire, relève Nicole Cochelin, dermatologue à Montfort-sur-Meu, à l'ouest de Rennes.

- "Eduquer à se protéger des UV" -

Cette augmentation se produit alors que la Bretagne connaît une pénurie de dermatologues, à même de dépister les cancers de la peau qui peuvent s'avérer mortels. "A Saint-Brieuc, on comptait dix dermatos il y a dix ans, il n'y en a désormais plus qu'un. Et sur les 120 dermatos en Bretagne, 30% vont partir à la retraite d'ici cinq ans", s'alarme le Dr Cochelin, élue à l'Union régionale des professionnels de santé (URPS).

Aussi, pour parer à cette situation, des dermatologues ont mis en place depuis l'été 2021 des actes de téléexpertise avec les médecins généralistes. "Il y a un gros problème avec des gens qui ne pourront pas être vus. On veut limiter les pertes de chance, les médecins généralistes prennent une photo et nous l'envoient", explique-t-elle, précisant qu'il y a eu plus d'un millier de téléexpertises en un an.

Reste que l'accroissement des cancers de la peau est un phénomène mondial et durable, selon l'Organisation mondiale de la santé qui recensait en 2020 plus de 1,5 million de cas de cancers de la peau diagnostiqués et plus de 120.000 décès associés dans le monde.

Globalement, "les gens sont de plus en plus en extérieur et de plus en plus en vacances. Les populations asiatiques se protègent du soleil, pas les sociétés occidentales. Le bronzage est synonyme de +je suis allé en vacances+. Il va falloir que la population s'éduque à se protéger des UV", appuie M. Sulimovic, soulignant l'importance de la prévention et du dépistage précoce.

H.Meyer--CPN