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Le résistant commmuniste apatride Missak Manouchian aux portes du Panthéon
Le résistant commmuniste apatride Missak Manouchian aux portes du Panthéon / Photo: STEPHANE DE SAKUTIN - AFP

Le résistant commmuniste apatride Missak Manouchian aux portes du Panthéon

"Je meurs à deux doigts de la victoire": 80 ans jour pour jour après son exécution par les nazis, le cercueil du résistant Missak Manouchian, communiste, poète et apatride, a rejoint mercredi soir le Panthéon, pour une ultime reconnaissance de la Nation.

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Côte à côte avec son épouse, Mélinée, résistante et survivante comme lui des massacres d'Arméniens dans l'Empire ottoman, il a entamé son ultime procession sur quelques centaines de mètres juqu'au temple des grands hommes de la République.

"Ma chère Mélinée, ma petite orpheline bien-aimée. Dans quelques heures, je ne serai plus de ce monde": les premiers mots de son ultime lettre à sa bien-aimée, lus par Patrick Bruel, ont percé le silence, à la nuit tombante, dans un moment saisissant d'émotion.

Les deux cercueils, drapés aux couleurs de la France et portés par des soldats de la Légion étrangère, se sont avancés vers le Panthéon à l'intérieur duquel le président Emmmanuel Macron leur rendra un ultime hommage avant qu'ils ne rejoignent la crypte.

Les portraits de ses 23 compagnons d'armes, fusillés avec lui le 21 février 1944 au Mont-Valérien, entrent également au Panthéon sous une forme plus symbolique : leur nom sera gravé dans le caveau où les Manouchian vont reposer.

"Hommage à 23 étrangers, nos frères pourtant", s'est exclamé le secrétaire national du Parti communiste, Fabien Roussel, en arrivant sous la pluie pour l'hommage. "Enfin la résistance communiste entre au Panthéon", a-t-il lancé en remerciant le président Emmanuel Macron pour ce geste. Ils rejoignent ainsi Jean Moulin et la résistance gaulliste, panthéonisés dès les années 1960.

Le chef de l'Etat signe là sa quatrième panthéonisation après celles de l'écrivain Maurice Genevoix, de Simone Veil et de la star du music-hall Joséphine Baker. Il a aussi annoncé celle de Robert Badinter, mort le 9 février.

 

- "Identités" -

"Inacceptable", "insupportable", ont déploré le comité de soutien à la panthéonisation et les familles, qui accusent le Front national, dont le RN est l'héritier, d'avoir été fondé par des "nazis et des collaborationnistes".

Le chef de l'Etat a provoqué la colère du RN en soulignant que "les forces d'extrême droite seraient inspirées de ne pas être présentes".

"Indigne", a répondu le patron du RN Jordan Bardella sur Europe 1/CNews en reprochant au président "d'utiliser l'histoire nationale pour faire de la politique politicienne".

En plein débat sur l'immigration et le repli identitaire d'une partie de la société, l'hommage à ces combattants étrangers, "Français par le cœur et le sang versé", est aussi tout un symbole.

"La nation honore un étranger mort pour la France, tous ses frères de combat. Il nous obligent à nous poser la question : qu’est-ce qu’être Français ? Les identités ne s’excluent pas, elles s'additionnent", a souligné le sénateur communiste Pierre Ouzoulias, membre du comité de soutien à la panthéonisation.

Si le couple Manouchian reste uni dans la mort - ils reposaient tous deux au cimetière parisien d'Ivry - Mélinée n'est pas elle-même "panthéonisée".

- "Valeurs universelles " -

Comme pour l'entrée de Joséphine Baker en 2021, la cérémonie, qui doit durer une heure et demie, comprend de nombreux flash-backs en images et chansons sur la vie de Missak.

Le groupe de rock Feu ! Chatterton va aussi interpréter "L'Affiche rouge" de Léo Ferré, qui fit entrer le résistant dans la légende, juste avant que les cercueils ne franchissent les portes du Panthéon.

A quelques pas de la mort, Missak Manouchian, qui avait 37 ans, écrivit: "Bonheur à ceux qui vont nous survivre (...) Je suis sûr que le peuple français et tous les combattants de la Liberté sauront honorer notre mémoire dignement".

Rescapé des massacres d'Arméniens dans l'Empire ottoman, réfugié en France en 1925, Missak Manouchian rejoint en 1943 la résistance communiste où il s'illustra dans les rangs des Francs-tireurs partisans - Main-d'œuvre immigrée (FTP-MOI), un réseau alors très actif à Paris.

"Ils ont donné leur vie pour défendre les valeurs universelles. Avec eux, ce sont tous les combattants de la liberté qui sont honorés", s'enthousiasme la petite-nièce des Manouchian, Katia Guiragossian, sur RFI.

Durant le procès de Missak Manouchian et ses camarades, la propagande nazie placarda dans les rues de France une affiche avec les photos de 10 d'entre eux, l'air hagard et hirsutes, présentés comme "l'armée du crime", sur fond rouge, qui donnera son nom à la chanson de Léo Ferré.

M.García--CPN